03/06/2020 – Voir l'article paru dans LA LETTRE M
Les obligations de l'employeur. Jusque-là, à l'exception de ceux qui disposaient déjà d'outils nomades mis à disposition par leurs employeurs, les néo-télétravailleurs utilisaient souvent leur propre matériel. Mais qu'en est-il aujourd'hui, si le travail à distance doit être maintenu sur le long terme ? Sur ce point, le gouvernement est très clair : « L’employeur n’est pas tenu de verser à son salarié une indemnité (…) destinée à lui rembourser les frais découlant du télétravail ». Jérémie Aharfi, avocat toulousain spécialisé en droit du travail, précise cependant que « l'accord collectif ou la charte élaborée par l’employeur peuvent l'avoir prévu : dès lors, il faut s'y référer. » La jurisprudence penche ainsi pour une participation à certains “frais professionnels” (les fournitures de bureau, par exemple), sous la forme d'une allocation forfaitaire ou d'un remboursement sur factures. De même, c'est bien à l'employeur qu'il revient d’évaluer si le poste de travail est compatible avec le télétravail, notamment en matière d'accès aux mails et aux données professionnelles.
Maintenir la motivation de ses équipes. Un salarié en télétravail est supposé « être opérationnel et disponible pendant les horaires fixés » par l'employeur, précise le ministère du Travail. Cependant, travailler depuis son domicile, parfois sans espace dédié et en présence de conjoint et enfants, peut être jugé contraignant. De même, la rupture des liens physiques avec ses collègues peut influer sur le niveau de motivation. Autant de paramètres que les managers doivent prendre en compte s'ils souhaitent – ou doivent – prolonger l'expérience du télétravail. « Information régulière, priorisation des activités, animation d’équipe et appui à la réalisation du travail sont quelques-uns des rôles du management à distance », estime l'Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail (Anact), dont la dernière enquête (mai) démontre que 48 % des télétravailleurs s'estiment moins efficaces et 50 % plus fatigués qu'à l'accoutumée. Des enseignements qui invitent selon l'Anact à « renforcer les pratiques managériales en matière d’écoute des situations individuelles, d’appui à l’articulation des temps de vie et de partage du sens au travail » et à « outiller les managers en matière de régulation de la charge ». « Les situations de chaque salarié sont souvent très différentes, constate Frédéric Labarthe, dirigeant du cabinet régional CA Ressources Humaines (ex-Corinne Cabanes et Associés). Tout en valorisant l'autonomie, il faut donc individualiser l'animation des équipes, en passant davantage de temps avec chaque collaborateur, afin de détecter les signaux faibles. Ensuite, il est important de nourrir la dimension collective, de donner du sens à l'action de l'équipe, en insistant sur l'entraide et la reconnaissance. Et surtout, il faut être transparent, dire la vérité sur ce que l'on sait et sur ce que l'on ne sait pas. »
Et les cadres, qu'en disent-ils ? Le Florian Mantione Institut, basé à Montpellier, vient de publier une enquête portant sur le télétravail de cette catégorie de salariés durant la crise sanitaire. Résultat : 82 % des personnes interrogées ont apprécié cette nouvelle situation et 70 % disent avoir aussi bien travaillé à la maison qu’au bureau. « La grande majorité des cadres déclarent avoir le soutien et la confiance de leur entreprise, explique Augustin Valero, dirigeant associé du Florian Mantione Institut. Cette période de confinement s’est avérée être une formation forcée ; plus de deux tiers des cadres déclarent avoir progressé et gagné en autonomie. » Et de conclure : « Les managers devront être capables de diriger, animer, contrôler et faire évoluer leurs collaborateurs autrement qu’en présentiel : c’est un challenge que l’entreprise devra relever. »